Big food, le plus Grand des Dealers
Une drogue légale, pas chère et pour toute la famille !
-“Certaines des plus grandes entreprises utilisent des images cérébrales pour étudier comment nous réagissons à certains aliments. Ils ont découvert que le cerveau s'allume pour le sucre de la même manière qu'il le fait pour la cocaïne.” - Michael Moss dans Salt Sugar Fat, How the Food Giants Hoocked Us.
J’ai remarqué que le sucre a un un effet sur moi qui va au delà du goût. Ça fait quelque chose de puissant dans mon cerveau, il agit sur mes émotions.
Cette drogue a été au centre de mon alimentation depuis si longtemps que c’était impossible de la voir comme une addiction. C’était “normal”.
Notre relation remonte aussi loin que je m’en souvienne. Elle a enrobé tous mes souvenirs d’enfant, mes fêtes d’anniversaire, mes diners en famille. Elle m’a souvent été offerte en cadeau par des adultes.
Elle m’a apaisé quand j’étais stressé, m’a consolé quand j’étais triste, m’a rempli quand je me sentais vide. Parfois, elle m’a boosté, mais le plus souvent elle m’a donné d’énormes coups-de-barre m’obligeant à m’allonger et dormir.
Dans mon pays natal on n’imaginait pas les dégâts que ça provoquerait en une génération à peine…
Rayons de supermarchés remplis de “croquettes humanisées”.
Quelques heures après sa consommation j’avais des sensations de malaise avec des faims furieuses, je me baladais avec des barres de céréales pour traiter ces hypoglycémies ou fringales. D’autres fois, je n’avais pas faim, mais juste une envie impérieuse de sucrée, un manque. Mon cerveau me suppliant de lui offrir cette sensation encore et encore.
Comme pour un ami très proche mais toxique, j’ai du m’en éloigner.
Ce n’était pas que le sucre qui avait cet effet, mais tout un ensemble de produits hyper-raffinés. Des mélanges nouveaux, riches en sucre, en céréales et d’autres types de glucides transformés dont les farines; mélangés avec des huiles végétales désodorisées, des parfums et exhausteurs de goût pour créer des mélanges industriels “irrésistibles” que l’on appellera “croquettes humanisées”.
Parodie de livre pour enfants: “Réprimer une rage meurtrière avec du sucre”.
L’addiction aux sucres est une vraie addiction et doit être traitée en tant que telle.
Il y a plusieurs raisons à cela :
L’industrie agro-alimentaire bricole notre régime avec l’aide d’outils de type” food engineering” ( génie alimentaire en français ): C’est de la chimie qui consiste en l’atomisation des composés, ré-assemblage, texturisation, aromatisation, émulsification, maquillage…
Ces nouveaux mélanges sont testés pour atteindre le “Bliss Point”, qui pourrait se traduire par “Le Goût qui fait Disjoncter le Cerveau”. Le but étant de produire une sensation extrêmement plaisante, intense, de courte durée qui va produire une addiction puis un manque ( craving ).
Les plats prêts-à-manger permettent une prise immédiate et impulsive sous couvert de facilité. En retirant le rituel de préparation des repas, ils permettent d’accélérer cette boucle de consommation-manque-consommation...
Le super-raffinement qui résulte des passages multiples en usine et du ré-assemblage en chaîne induisent une augmentation du rythme d’absorption de “calories vides”. Ça donne une sensation de “shoot” pour le cerveau et ça court-circuite notre système de protection intestinale ( incrétines ).
Comme c’est pré-digéré on utilise moins d’énergie pour tout le processus de digestion ce qui augmente donc le nombre de calories qui restent dans l’organisme.
Notre attrait pour le sucre est naturellement dérégulé, car les sucres que l’on peut utiliser sont rares dans la nature. Quand il y en avait, il fallait en faire le plein ( fruits, miel ).
La gastronomie et Big Food l’ont bien compris: c’est en proposant des mélanges de goûts nouveaux et originaux qu’on attire l’attention d’un cerveau avide de nouvelles expériences. La différence étant que big food élimine la satiété pour engendrer la compulsion. Or l’impact le plus important sur la satiété est dans le mélange protéine + gras que vous trouverez rarement dans les recettes industrielles.
Les changements du microbiote, engendrés par cette alimentation riche en sucres raffinés, aggrave l’addiction et perpétue le cycle vicieux. Nos bactéries intestinales deviennent, aussi, droguées aux sucres et elles en redemandent.
Pourquoi on n’arrive pas à changer de cap ?
C’est moins cher à court terme, certes. Mais à long terme, le prix est exorbitant si on compte les médicaments, les traitements, la perte d’activité, de temps perdu et la souffrance humaine.
L’objectif des entreprises est l’expansion. Il y a un véto systématique des actionnaires pour les modifications qui pourraient diminuer les ventes. Qui sont-ils ? Ce sont les gestionnaires des fonds de pension, de retraites, d’assurances-vie, c’est le monde entier qui réclame plus de ventes et plus de marges. Si vous achetez des actions de Big Pharma vous gagnez des deux cotés.
La seule façon de ralentir cette épidémie est de faire payer aux industriels pour les conséquences, sur le modèle du pollueur / payeur.
Les dix géants des “croquettes humanisées”.
💡 L’industrie alimentaire n’a rien à faire de notre santé. L’industrie de la santé n’a rien à faire de notre alimentation.
Voilà le drame actuel.
On mérite mieux ! On mérite d’arrêter les croquettes et manger des vrais aliments.
On mérite d’abandonner les allées centrales des supermarchés et de visiter les rayons périphériques où les produits n’ont pas besoin d’étiquettes.
On mérite un sevrage pour nous et notre famille de ces substances qui sont des parodies d’aliments.
On mérite d’exposer les dealers qui fabriquent ces produits nocifs, addictifs, destinés aux enfants. Ils méritent le même traitement que l’industrie du tabac car ils présentent les mêmes risques pour la santé des populations et appliquent les mêmes stratégies criminelles.
Pour adoucir cette fin de billet un peu de musique avec Paulinho Nogueira 🇧🇷
Ressources:
Impact de la consommation de produits ultra raffinés
Sel, Sucre, Gras: vidéo avec sous titre en français
Addiction au sucre avec Bitten Jonsson
Merci pour cet article,
Fuyons les couloirs de la mort, dans les grandes surfaces, mais peut être que le pire est dans les stations services!!
Amitiés